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Fiche technique :
Film français de Jean RENOIR
Année : 1937
Avec Jean GABIN (lieutenant Maréchal), Marcel DALIO (lieutenant Rosenthal), Pierre FRESNAY (capitaine de Boëldieu), Erich VON STROHEIM (capitaine von Rauffenstein puis commandant von Rauffenstein), Dita PARLO (Elsa), Julien CARETTE (Cartier), Gaston MODOT (l'ingénieur au cadastre), Jean DASTE (l'instituteur), Werner FLORIAN (Kantz, dit "Arthur"), la petite Peters (Lotte), Sylvain ITKINE 'lieutenant Demolder, dit "Pindare"), Georges PECLET (Charpentier), Habib BENGLIA (le Sénégalais), Claude SAINVAL (capitaine Ringis), Roger FORSTER (Maisonneuve), Jacques BECKER (l'officier anglais qui casse sa montre), Carl KOCH (le "gendarme de campagne"), Albert BROUETT, Georges FRONVAL, Karl HEIL, Michel SALINA.
Scénario et Dialogues : Charles SPAAK, Jean RENOIR
Assistant Réal. : Jacques BECKER, Robert RIPS
Conseiller Tachnique : Carl KOCK
Scripte : GOURDJI (Françoise GIROUD)
Décors : Eugène LOURIE, assisté de Georges WAKHEVITCH
Costumes : René DECRAIS
Habilleuse : Suzy BERTON
Maquilage : RAFFELS (Raphaël's)
Accessoiristes : Alexandre LAURIE, Raymond PILLON
Chef Opérateur : Christian MATRAS
Cadreur : Claude RENOIR
Assistant Opérateur : Jean-Serge BOURGOIN, Ernest BOURREAUD
Ingénieur du son : Joseph de BRETAGNE
Montage : Marguerite RENOIR, assistée de Marthe HUGUET. Un nouveau montage a été réalisé en 1958 par Renée LICHTIG, assistée de Fernande
Musique : Joseph KOSMA (éditions Smyth)
Chanson : Marguerite si tu veux mon bonheur de Vincent TELLY et Albert VALSIEN est interprétée par Julien CARETTE
Directeur d'Orchestre : Emile VUILLERMOZ
Format : Noir et blanc
Genre : comédie dramatique
Durée : 113 minutes |
L'histoire :
Pendant la Première Guerre mondiale, le lieutenant Maréchal et le capitaine de Boëldieu sont capturés par le capitaine von Rauffenstein. Les deux capitaines, aristocrates, se respectent sous le regard de Maréchal le roturier et de Rosenthal le juif.
Critique :
Apologue résolument pacifiste, ce film n'est pas pour autant antimilitariste : la grandeur des armes, la fraternité guerrière et la dignité des soldats y sont magnifiées. Ce n'est pas non plus une illustration du schéma marxiste de la société divisée en classes, où la solidarité entre membres d'une même catégorie sociale serait plus forte que les nationalismes : certes, von Rauffenstein traite Boïeldieu avec des égards en raison de sa condition d'aristocrate et d'officier de carrière, et un prisonnier français sympathise avec son gardien allemand parce qu'ils sont tous deux hommes du peuple; mais l'officier français se sacrifiera dans un geste héroïque pour permettre au métallo parisien de s'évader. Le patriotisme et la solidarité nationale l'emportent. La richesse idéologique du film tient dans son ambiguïté. L'universalité de son message, son souffle humaniste, sa générosité, son humour autorisent toutes les récupérations. Sa puissance d'émotion (Fresnay, Gabin, Dalio, Stroheim sont boulversants) en fait le chef-d'oeuvre (seul film français figurant sur la liste des "douze meilleurs films du monde", établie en 1958) qui suffirait à la gloire de Renoir.
Norbert MULTEAU (Guide des Films, Collection Bouquins, Robert Laffont)
Ce n'est pas le film préféré des "renoiriens" (François Truffaut regrettait que "la psychologie y prime sur la poésie", mais c'est celui qui valut à auteur une notoriété internationale. Du président Roosevelt déclarant à l'issue d'une projection à la Maison Blanche : "Tous les démocrates du monde doivent voir ce film" , à Goebbels qui le tenait pour l'ennemi cinématographique numéro un, et chercha à en faire détruire toutes les copies. Le propos de Renoir était pourtant plus modeste : Montrer que même en temps de guerre des combattants peuvent rester des hommes." En s'inspirant des souvenirs de l'adjudant Pinsard, un récédiviste, il brosse un tableau familier et presque convivial des camps de prisonniers pendant le Première Guerre ùondiale. Pas le moindre coup de clairon patriotique : rien que la dénonciation des barrières géographiques et ethniques, insulte aux lois de la nature.
La dernière partie, souvent critiquée, qui réunit les deux évadés et une paysanne allemande (émouvante Dita Parlo), quelque part dans un no man's land en marge du conflit, reste le point fort du film, débordant de lyrisme et contredisant l'opinion négative de Truffaut.
Claude BEYLIE (Télérama)
La Grande Illusion, écrivait François Truffaut, est construite sur l'idée que le monde se divise horizontalement , par affinités, et non verticalement, par frontières.
De là l'étrange relation du film au pacifisme : la guerre abat les frontières de classe. Elle lie l'aristocrate et le fabricant de textiles, l'instituteur et le contremaître, et instruit les hommes. Il y a donc des guerres utiles, comme les guerres révolutionnaires, qui servent à abolir les privilèges et à faire avancer la société.
En revanche, suggère Renoir, dès que les officiers, qui n'ont d'autre destin que de mourir en combattant, auront disparu, alors les guerres pourront être abolies : c'est le sens de la seconde partie du film, beaucoup plus noire. Stroheim et Fresnay ont l'emphase de leur classe sociale. Jean Gabin, incarnation de l'homme du peuple, est formidable. Un chef-d'oeuvre absolu.
Claude BEYLIE (Télérama)
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