Critique :
Stanley Kubrick a construit son récit en trois segments étonnamment distincts. L'instruction des marines, et son cortège d'humiliations, constitue la partie la plus classique (certaines séquences du Maître de guerre de Clint Eastwood, sont assez similaires), mais l'intervention verbale su sergent Hartman (joué par un authentique instructeur militaire, dont la verve avait enthousiasmé Kubrick) lui donne une intensité peu commune.
A ce travail de "déshumanisation" des jeunes recrues, à la fois cocasse et insoutenable, succède l'intermède vietnamien de la "désinformation", traité sur un mode quasi documentaire : le quotidien du soldat en goguette - à qui Mathhew Modine prête une étonnante humanité - marque une pause avant l'apocalypse finale. Car l'offensive du Têt devient un fait d'armes abstrait, un jeu d'échecs (ou de go) d'une incroyable violence, auxquels l'armée américaine n'est paradoxalement pas préparée. La mise en scène de Kubrick approche le génie : non seulement elle fait du vrai avec du faux - le Vietnam reconstitué en studio à londres avec végétation importée d'Orient ! - mais elle invente un enfer géométrique (les ruines vietnamiennes en écho au labyrinthe de Shining) bien plus effrayant que toutes les visions de film d'horreur ! Il y a du Mondrian dans ces séquences finales qui sont une magistrale leçon de cinéma.
Aurélien FERENCZI (Télérama)

Cinéaste de l'extrême, ambitieux et perfectionniste, Kubrick nous livre de plein fouet sa vision d'une guerre qui a meurtri à tout jamais l'Amérique. Sa technique impeccable au service d'un scénario en béton impose des scènes d'une rare violence, rendues plus fortes encore par le décor impersonnel dans lequel évolue les acteurs. Un cinéma brutal et pur. Fascinant.
Estelle RUET (Télé K7)