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DR FOLAMOUR

Fiche technique :
Film britannique de Stanley KUBRICK
Année : 1964
avec Peters SELLERS (le capitaine Lionel Mandrake/le président Muffley/Docteur Folamour), George C. SCOTT (le général Turgidson), Sterling HAYDEN (le général Jack D. Ripper), Keenan WYNN (le colonel Bat Guano)
Scénario : Stanley KUBRICK, Terry SOUTHERN et Peter GEORGE d'après le roman de Peter George : "Red Alert "
Images : Gilbert TAYLOR
Musique : Laurie JOHNSON
Titre original : "Doctor Strangelove, or How I learned to stop worrying and love the bomb"
Durée : 95 mn
Genre : Farce grinçante et macabre


L'histoire :

Comment arrêter un bombardier américain parti par erreur larguer ses charges nucléaires sur l'URSS ? Le président des Etats-Unis prend les choses en main pour corriger la bourde commise par un général belliciste à l'extrême.


Il faut se remettre dans le contexte de la guerre froide pour apprécier l'ironie mordante de Stanley Kubrick. Si, au début des années 60, Hollywood produit plusieurs oeuvres de politique-fiction, décrivant les possibles engrenages menant à un conflit nucléaire, Docteur Folamour est le seul à traiter le sujet avec le sourire crispé du condamné en sursis, conscient d'être conduit à la catastrophe par un troupeau d'irresponsables. Le cinéaste ridiculise l'état-major américain de façon admirable. Les compositions de George G. Scott ou de Sterling Hayden sont savoureuses et, au fond, d'une violence incroyable. Mais c'est Peter Sellers qui, évidemment écrase le film, dans un triple rôle étourdissant : il s'en donne à coeur joie en Docteur Folamour paralytique (ou créature ratée ?) de Werner von Braun, avec accent et prothèses multiples. L'image finale du major Kin Kong sautant de son B-52 à califourchon sur une bombe atomique coince un peu le rire dans la gorge... Qui sait si la fin de la guerre froide et l'éclatement du bloc de l'Est ne rendent pas le film plus actuel que jamais ?

Aurélien FERENCZI (Télérama)


APOCALYPSE GO !

Un film délirant qui est un chef-d'oeuvre d'humour noir sur le péril atomique

1963. Ere de paranoïa nucléaire. Kennedy vient de forcer Khrouchtchev à retirer les missiles russes de Cuba. Kubrick, pour la première fois seul maître à bord, détourne un bouquin anonyme et réalise autour de la menace atomique une farce tragique d'une noirceur absolue, peuplée de pantins obsessionnels, réacs et abrutis, devenus légendaires.
A la base de Laputa, persuadé que les Russes empoisonnent l'eau du monde, un général américain (Sterling Hayden, génial) déclenche la troisième guerre mondiale, puis cigare au bec tire à la mitrailleuse sur ses propres troupes avant de se faire sauterle caisson. A l'intérieur du bombardier fatal, le major Kong abandonne la lecture de "Playboy", se coiffe d'un stetson, fonce vers l'objectif et finit par chevaucher la bombe en hurlant comme au rodéo.Par le téléphone rouge, le président américain prévient son collègue russe complètement saoul (déjà) : "Euh... Dimitri, un de nos généraux a fait une boulette...", pendant que le Docteur Folamour, savant nazi appelle le président "Mein Führer" et ne réprime plus un salut hitlérien nerveux.
Les propres fantasmes de Kubrick, l'étude des pulsions meurtrières, la folie, l'aliénation, sont tous là, et plus de trente ans après, le film n'a rien perdu de sa puissance, et demeure au moins prémonitoire sur un point : la vodka règne toujours au Kremlin.

Yves LE GRIX (Le Nouvel Observateur)


Un film clé dans la carrière de Kubrick. Pour la première fois, il est son propre producteur et peut donc contrôler totalement sa création. Il marque aussi le début de sa notoriété. Docteur Folamour, sorte de fable drôle et terrifiante, est devenue une référence obligée quand on évoque la menace nucléaire qui pourrait peser sur notre planète si des dirigeants fous en faisaient mauvais usage.

Catherine TACONET (Télé K7)


Ce film, après de grandes réussites, est le premier où le génie de Kubrick s'affirme totalement et entame une série ininterrompue de chefs-d'oeuvre. L'humour ravageur et burlesque qui le caractérise , et qui a pu choquer, est celui d'un désespoir dépassé par l'horreur. L'amour dont il est question dans le titre est ici amour irrationnel de la mort : le pilote du bombardier à cheval sur la bombe, tombe avec elle en agitant son chapeau texan et en hurlant de joie comme à un rodéo; sa mort sera aussi celle de ces ennemis. La fin du monde qu'annonce le docteur Folamour, paralysé depuis la dernière guerre, l'exalte tellement qu'il se remet à marcher. Création hors pair de Peter Sellers dans un triple rôle.

Stéphan Krezinski (Dictionnaire des Films, Larousse)


Un film délirant, chef-d'oeuvre d'humour noir sur le péril atomique et qui fit sensation à l'époque. La composition de Peter Sellers qui tient trois rôles dont celui hallucinant du Dr Folamour, un ancien nazi qui ne peut s'empêcher de faire le salut hitlérien, est extraordinaire.

Jean TULARD (Guide des Films, Bouquins)


Plusieurs films ont tenté de donner à voir la fin apocalyptique du monde par la destruction atomique. Stanley Kubrick osa être drôle, d'un humour énorme, sans gentillesses ni finesses, avec un sujet pareil. Et son film, le célèbre Dr Folamour (Dr Strangelove or how I learned to stop worrying and love the bomb) n'en est pas moins un des plus efficaces qui soit. Traduisons pour une fois le sous-titre anglais sacrifié par la version française : "Ou comment j'ai appris à ne plus m'en faire et à aimer la bombe", et nous comprendrons que tout compte fait, Kubrick adresse aux hommes une très vigoureuse mise en garde. Il suffit de quelque général fou, d'une poignée d'hommes sous l'uniforme assez bien dressés par le système militaire pour éxécuter sans l'ombre d'un jugement n'importe quelle consigne, pour que tout saute, ou du moins pour que le déclanchement de la guerre atomique soit irréversible. On voit ce que l'humour ici a de noir et, en même temps, de tonique. Que le film se présente comme une farce gigantesque n'ôte rien à son caractère de précise et précieuse politique-fiction, une fiction derrière laquelle Kubrick laisse percevoir l'effroyable réalité du pouvoir des militaires dans son pays (et dans d'autres).

(Encyclopédie Alpha du Cinéma, 1978)


Ciné-Club de CAEN : analyse et critique de films d'art et essai

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