JERSEY BOYS


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Fiche technique :
Film américain de Clint EASTWOOD
Année : 2014
Avec John Lloyd YOUNG (Frankie Valli), Erich BERGEN (Bob Gaudio), Vincent PIAZZA (Tommy DeVito), Michael LOMENDA (Nick Massi), Christopher WALKEN (Angelo "Gyp" DeCarlo), Kathrine NARDUCCI (Mary Delgado), Freya TINGLEY (Francine Valli), Steve SCHIRRIPA (Vito), James MADIO (Stosh), Mike DOYLE (Bob Crewe), Jeremy LUKE (Donnie), Erica PICCININNI (Lorraine), Joey RUSSO (Joe Pesci), Ian Scott RUDOLPH (Directeur d'Allentown Lounge), Michael Patrick McGILL (Officier Mike), Johnny CANNIZZARO (Nick DeVito)
Scénario : Rick ELICE et John LOGAN, d'après la comédie musicale Jersey Boys de Marshall BRICKMAN
Direction artistique : Patrick M. SULLIVAN Jr.
Directeur de la Photographie: Tom STERN
Montage: Joel COX et Gary D. ROACH
Décors : Ronald R. REISS
Musique : Bob GAUDIO
Costumes : Deborah HOPPER
Durée : 134 mn
Genre : Musical



 





L'histoire :
En 1951, à Belleville dans le New Jersey, Tommy DeVito est un jeune Italo-Américain qui vit de plusieurs arnaques. Il est ami avec Frankie Castelluccio, qui possède une voix magnifique. Frankie est très apprécié par Gyp DeCarlo, le mafieux local, qui l'aide souvent.
En plus de leurs petits larcins, Tommy, son frère Nicky et leur ami Nick Massi se produisent dans un club, sous le nom de The Variety Trio. Un soir, Tommy invite Frankie sur scène. Ce dernier se met d'emblée le public dans la poche, avec sa belle voix aiguë. Alors que l'idée d'un groupe émerge, Frankie rencontre la sublime Mary Delgado, qui lui conseille de s'appeler Frankie Valli (avec un "i" et non un "y").
Après le départ de son frère Nick, Tommy demande à son ami Joe Pesci de lui trouver quelqu'un d'autre pour le groupe, alors nommé The Four Lovers. Pesci leur présente alors Bob Gaudio, auteur-compositeur-interprète. Après quelques discussions houleuses, Bob Gaudio rejoint finalement le groupe. Après s'être fait jeter d'un bowling où ils devaient se produire, ils se retrouvent sous une enseigne qui leur inspire le nouveau nom de leur groupe : The Four Seasons....








Imaginez quatre filous italo-américains gominés semblant sortir du Parrain devenir des pop stars. Ce n'est pas une blague, mais la réalité, méconnue en France et légendaire aux Etats-Unis, des Four Seasons, seul groupe américain, avec les Beach Boys, à avoir pu résister un peu à l'invasion des Beatles, au début des années 1960, grâce à une flopée de hits (Sherry, Big girls don't cry, Rag Doll...).
Mais autant les Fab Four incarnaient la modernité, autant les Four Seasons avaient des looks de mafiosi en herbe. Savoir que Joe Pesci en personne, futur acteur de Martin Scorsese, a joué un rôle dans la formation de ce quatuor est croustillant. Le kitsch mis à part, les Four Seasons avaient un sacré talent, qui reposait surtout sur la voix exceptionnelle, aussi nasillarde que très haut perchée, de Frankie Valli (faux air d'Al Pacino) et sur les compositions harmonieuses de Bob Gaudio.
On savait Eastwood passionné de jazz (Bird) et de country (Honkytonk Man). La pop-rock, c'est moins son rayon, mais on perçoit très bien ce qui a pu lui plaire dans le scénario, inspiré d'une pièce à succès de Broadway : l'histoire d'un groupe musical dont la création, l'ascension puis la dissolution sont directement liées à la culture d'un quartier du New Jersey. Et de sa figure discrètement tutélaire, un insolite mafieux, interprété par Christopher Walken, veillant sur ses ouailles. Le ton choisi est celui du récit picaresque, pris en charge à tour de rôle par les quatre musiciens, qui s'adressent à la caméra. Chacun d'eux a un rôle spécifique dans cette alchimie, chaque voix compte, puisque les Four Seasons est un groupe avant tout choral, débordant d'énergie chaloupée et d'humour (avec des paroles empruntées à des répliques de western !). On est très loin du cortège de clichés véhiculés par la "rock'n'roll attitude".
Le seul qui pourrait à la limite s'y conformer, c'est ce noceur mal dégrossi qui joue les petits caïds, mais qui finit par devenir un boulet avec ses dettes, au point de susciter une réunion de crise, dans le salon cossu du parrain. La séquence, très drôle et cruelle, sonne comme la fin de la récré pour ces stars ingénues, dont l'une - Frankie Valli - va redoubler d'efforts pour être un adulte responsable et respectable. Au point de rembourser lui-même les dettes colossales contractées par son partenaire - geste qui rappelle les thèmes du sacrifice, voire du masochisme, chers à Eastwood. Le chanteur est alors contraint de se produire en solo et de cachetonner aux quatre coins du pays, en passant quasiment du statut de VIP à celui de VRP de la chanson. On le voit, aussi, tenter d'être un bon père sans y parvenir. Tout cela, Clint Eastwood le raconte et le glisse par petites touches, toujours sobres, dans les moments allègres comme mélancoliques. Jersey Boys n'est pas un grand film, cède parfois à un sentimentalisme convenu, mais il est très plaisant à regarder, distrayant sans être idiot. Fidèle à l'esprit de ces quatre types qui ne se sont jamais pris pour des artistes, mais pour des artisans s'efforçant de bien faire leur boulot. Rien de plus, rien de moins.

Jacques Morice (Télérama)








"Jersey Boys" ou les revers du rêve américain

Avec cette histoire d'un groupe de chanteurs des années 60, Eastwood raconte les revers du "rêve américain". Une mise en scène fluide et un tempo vivace.
Aux Etats-Unis, des stations de radio oldies passent en boucle les tubes des années 50 et 60. Elvis, Beatles ou Beach Boys sont au programme, mais aussi et surtout les one-hit wonder, ces scies que tout le monde connaît par cour mais dont les auteurs aux noms oubliés n'ont duré qu'un ou deux étés. Aujourd'hui, qui se souvient de Dion And The Belmonts, Little Anthony And The Imperials, The Crystals, Johnny Ace, Bobby Vinton ou Little Eva ? Pourtant, tout le monde connaît (même sans le savoir) The Wanderer, Tears on My Pillow ou Locomotion.
C'est à l'une de ces séries B de la pop américaine que Clint Eastwood consacre son nouveau film au titre springsteenien, adaptant à l'écran un musical à succès de Broadway. Soit donc Frankie Valli et les Four Seasons, quatre prolos italo-ricains du New Jersey qui connurent la gloire avec une petite brochette de tubes (Sherry, Big Girls Don't Cry, Walk Like a Man.) à l'orée des sixties, avant d'être balayés par les Beatles et la British invasion. Mélodies contagieuses, harmonies doo-wop, falsetto vibrant du leader, rythmiques allègres concouraient à l'attrait irrésistible des Four Seasons - vous verrez, à la sortie du film, leurs tubes squatteront votre cerveau pendant plusieurs jours.
Jersey Boys n'évoque pas la concurrence des Beatles et montre que les Four Seasons n'ont pas eu besoin de la vague anglaise pour dégringoler : conflits d'ego, problèmes conjugaux, dettes, cadences de travail, promiscuité des tournées, intrusion de la Mafia, tous les ingrédients habituels du cocktail qui fait imploser les groupes se sont conjugués pour détruire les Four Seasons.
A travers cette formation de second plan, Clint Eastwood raconte une histoire à la fois typiquement américaine et emblématique de l'industrie du spectacle, celle d'individus du bas de l'échelle sociale qui atteignent trop tôt et trop vite le "rêve américain". Une fois au sommet, ils ne savent pas comment s'y maintenir, ni comment "gérer" leur fortune financièrement, psychologiquement, affectivement. Le succès ne vous apprend pas comment rendre votre épouse heureuse, ni comment éviter de dangereuses fréquentations, ni comment demeurer un groupe solidaire qui résiste aux pulsions individualistes et au temps. L'histoire des Four Seasons, c'est finalement un peu celle des Beatles, un peu celle d'Elvis, un peu celle de Marilyn.
Eastwood filme cette histoire mille fois racontée avec un classicisme souverain. Le tempo est aussi vivace que celui de Walk Like a Man, les dialogues sont lustrés à la gomina (au moment où ils choisissent leur nom : "C'est qui Vivaldi ? Un chanteur concurrent ? Fuck him !") et le vieux Clint utilise même de petits effets brechtiens (probablement empruntés à la version musical) quand chaque membre du groupe s'adresse face caméra au spectateur (mais toujours dans le flux de l'action) avant de raconter sa portion de la story.
Le film menace parfois de se figer dans le chromo sixties mais y échappe toujours grâce à la vitesse du récit, à la fluidité de la mise en scène et à la brillance des dialogues. Grâce aussi à la prestance des acteurs, inconnus du grand public (excepté l'immense Christopher Walken), qui reprennent tous leur rôle de la version Broadway. A la fin, tout finit en chanson, comme dans les intronisations rituelles des vieilles gloires du rock au Rock and Roll Hall of Fame : grande séquence, où l'on voit que cette institution est aussi une grande entreprise de rabibochage de musiciens souvent séparés par les rivalités. Après le Hall of Fame, tous les personnages du film (amis, ennemis, traîtres, girlfriends larguées, épouses quittées, mafieux menaçants.) sont réunis pour un dernier tour de piste, une chorégraphie enlevée, tournée dans l'arrière-cour de Clint, le backlot des studios Warner. Artifice de musical qui dit la morale de ce feel-good movie, la même finalement que celle du Rock and Roll Hall of Fame : mettez de côté les bosses de la vie réelle, ou transformez-les en story, mais priorité au spectacle.

Serge Kaganski (Les Inrocks)








Polyphonie des regrets, par Josué Morel
Drôle de trajectoire que celle de Clint Eastwood, qui depuis le très faiblard Invictus, l'inégal Au-delà et le beau mais mal aimable J. Edgar, semble avoir écorné son statut de grand auteur populaire, incontesté il y a encore cinq ans. Avec Jersey Boys, biopic consacré au fulgurant succès de Frankie Valli et de son groupe, The Four Seasons, le cinéaste semble renouer avec la grande forme classique, en ressuscitant au passage le genre déserté du film musical. Il y avait là le potentiel à une fresque de l'ampleur des longs-métrages de Scorsese (auquel Eastwood emprunte d'ailleurs les apartés à la caméra et la construction en deux temps d'un récit autour d'une ascension et d'une déchéance), que le réalisateur de Mystic River semble étrangement refuser pendant près de 2h20. Car Jersey Boys, c'est là son intelligence, et sa singularité, tient plutôt de l'ouvre mineure mais gracieuse, où l'auteur, retranché derrière son sujet, met la science de sa mise en scène au service d'un groupe sans héros. Si Frankie Valli occupe certes la place centrale de l'intrigue, le jeu de son interprète (John Lloyd Young, impeccable), tout en retenue, ne lui permet jamais de se distinguer véritablement de ses compagnons de jeu. Qu'Eastwood autorise chacun des personnages, sauf Valli, à s'adresser directement au spectateur, témoigne bien de sa volonté de ne pas articuler son récit autour d'une seule figure.

Suite sur le site de Critikat







Clint Eastwood : Jersey Boys







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